Portrait. Le Loirétain Bernard Vaussion, ancien chef cuisinier de l’Elysée

Publié : 4 septembre 2023 à 6h00 par Alicia Méchin

Bernard Vaussion, ancien chef cuisinier de l’Elysée
Bernard Vaussion, ancien chef cuisinier de l’Elysée
Crédit : EMMANUEL DUNAND / AFP

Il y a bientôt 10 ans, le chef Bernard Vaussion prenait sa retraite après 40 ans passés dans les cuisines de l’Elysée… Originaire du Loiret, et fils d’une mère cheffe dans un château en Sologne, il a gravi les échelons au fil des ans, et servit pas moins de 6 présidents de la République !

Cette carrière incroyable, nous avons voulu qu’il nous la raconte. Mais difficile, en si peu de temps, de tout nous dire… Des bons souvenirs, il en a des milliers, comme ce déjeuner de deux heures avec Barack Obama. « Il nous a reçu à déjeuner en privé. Il a passé deux heures avec nous, ce n’est quand même pas rien », se remémore Bernard Vaussion.

Des mauvais souvenirs, il n’en a pas vraiment, si ce n’est la pression du métier. Car être chef cuisinier de l’Elysée, ce n’est pas rien. « La pression, elle est évidente. On ne peut pas se contenter de dire que tout ira bien. On sert le Président de la République, et en même temps on dégage l’image de la France lorsqu’on reçoit beaucoup de chefs d’états étrangers, des Premiers ministres, ou la Reine d’Angleterre ».

 

Dévouement

 

Bernard Vaussion a dédié une grande partie de sa vie aux Présidents de la République ; Georges Pompidou, Valéry Giscard d’Estaing, François Mitterrand, Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy, et François Hollande. « La priorité, c’est le Président de la République », nous explique-t-il.

Il accompagnait le chef de l’Etat dans son quotidien à l’Élysée, à l’étranger, mais aussi en vacances. « Je suivais à Brégançon Valéry Giscard d’Estaing…  Jacques Chirac, beaucoup. François Mitterrand beaucoup moins, parce qu’il n’aimait pas qu’on intervienne spécialement (…) Pour Nicolas Sarkozy, Brégançon servait de base arrière, car il allait au Cap Nègre dans la propriété de Carla (ndlr : Bruni). Tout ça, c’était très agréable, parce que c’est beaucoup plus détendu. On les croise le matin, le soir, il y a un peu plus d’intimité entre nous ».

Malgré ces obligations, parfois (très) contraignantes, le chef parle de ces années avec toujours autant de passion, conscient d’avoir vécu une vie peu ordinaire. « C’est vrai que c’est une vie un peu particulière, mais bon on arrive à s’organiser et à avoir une vie tout à fait correcte », nous dit-il, n’oubliant pas de mentionner ses 50 ans de mariage avec son épouse !

 

Poulet du dimanche

 

Régulièrement interrogé sur sa vie passée, Bernard Vaussion ne manque pas de raconter quelques anecdotes au sujet des Présidents qu’il a servi. Avec en tête, Jacques Chirac, le « plus facile », nous explique-t-il. « C’est quelqu’un qui adorait manger. C’était pour nous un bon client ! ». Il faut savoir que l’équipe en cuisine est un « outil » pour les Présidents. C’est donc très rare qu’ils décident de se faire à manger par eux-mêmes. "J’ai pu voir François Mitterrand avec une poêlée de cèpes, c’était une catastrophe (rires). Jacques Chirac adorait son poulet rôti du dimanche. Il le découpait lui-même mais le pauvre poulet… heureusement qu’il était mort. »

Chaque repas est par ailleurs anticipé. Il n’y a pas de place pour l’improvisation à l’Elysée. « Lorsqu’ils passent à table, j’ai déjà prévu en amont, nous explique Bernard Vaussion. C’est la partie la plus compliquée que le chef a à remplir. Parce qu’on ne met pas juste un menu. Il faut mettre deux ou trois entrées, deux ou trois suites, deux ou trois desserts… à chaque menu ! »

 

Retraite sans regret 

 

Le chef loirétain a décidé de prendre sa retraite en octobre 2013, en plein mandat de François Hollande. « Il m’avait proposé de terminer le mandat avec lui. Mais je n’avais pas envie. C’est quand même une charge importante. Ce sont des soucis aussi.  J’avais envie que ça s’arrête un petit peu ». Il a alors été remplacé par son adjoint, Guillaume Gomez.

Pour autant, Bernard Vaussion ne s’est pas éloigné des fourneaux. Son quotidien reste tourné vers la gastronomie. Il fait régulièrement partie de jurys pour des concours culinaires nationaux ou internationaux. Il se déplace également dans les lycées hôteliers ou les CFA pour rencontrer des jeunes, pour leur « expliquer un peu ma carrière, et que si on travaille on arrive à avoir des postes importants ». Il apporte aussi son aide à des associations, bénévolement.